Résumé : En 1898-1899, l’affaire Dreyfus bat son plein, et les dreyfusards se mobilisent en meetings et dans la presse pour défendre le capitaine condamné. Au même moment, l’éducation populaire connaît un grand succès en intégrant des projections à la lumière oxhydrique dans ses enseignements. C’est notamment le cas dans le milieu des universités populaires. Les dreyfusards vont reprendre à leur compte ce « pré-cinéma », et introduire la projection de supports visuels dans leurs conférences afin d’illustrer le propos des orateurs. Parmi les supports projetés, on trouve des photographies de Dreyfus, Esterhazy, Zola, Picquart, et des autres grands protagonistes de l’affaire. Des images en lien avec Dreyfus sont donc politiquement récupérées, projetées, et réinterprétées au service d’une cause militante. Les mouvances de gauche et les ligues républicaines sont aux manettes de ces « conférences documentaires » qui vont de l’été 1898 au procès en révision de Dreyfus. Elles se tiennent principalement en région parisienne et s’exportent mal en dehors des villes, contrairement aux grands meetings de la Ligue des droits de l’homme qui partant des métropoles réussissent à s’implanter dans les campagnes.
Résumé : Cet article propose de questionner par la psychologie du développement l’interstructuration entre les crises sociale, climatique, politique et la transition développementale de l’adolescence et d’entrée dans l’âge adulte. S’appuyant sur le modèle de la socialisation plurielle de Malrieu (2013), l’étude dont il est question ici se centre sur les processus psychosociaux en jeu dans le vécu et le dépassement des crises et conflits chez les jeunes (15-25 ans) engagés au sein de collectifs de lutte pour le climat en France. Selon une approche compréhensive et qualitative ont été réalisés des entretiens autobiographiques montrant que le contexte sociétal peut être source de tensions et contradictions chez les jeunes, l’engagement politico-climatique devenant une ressource à la fois personnelle et collective pour y faire face. L’engagement offre des espaces de socialisation privilégiés propices à l’exploration et à la construction de soi et permet de mettre au jour la part active que joue le sujet dans son développement et la confrontation face aux crises sociétales.
Résumé : Le mouvement communiste a tôt érigé un puissant dispositif festif syncrétique, qui a trouvé sa forme la plus accomplie dans le modèle de la Fête de L’Humanité. Dans l’après-guerre, le dense réseau des fêtes communistes met en branle l’ensemble du conglomérat rouge, manifestant sa puissance politique ainsi que son autorité dans le champ culturel. Alors que les formes de la mobilisation militante à l’occasion des fêtes de la Jeunesse communiste (JC) sont relativement stables, leurs contenus culturels évoluent tout au long du second xxe siècle, des dernières « fêtes champêtres » au tournant des années 1950 aux grandes fêtes nationales des années 1970, censées illustrer l’ aggiornamento de la JC et la marche confiante des forces de gauche vers la conquête du pouvoir. Par étapes, la JC s’ouvre aux nouvelles formes culturelles, se convertissant partiellement au principe de démocratie culturelle, concurrent des options « démocratisatrices » du mouvement communiste depuis les années 1930, au risque d’une festivalisation et d’une dilution de son identité sociale et politique.
Résumé : L’extrême gauche – définie comme l’ensemble des groupes à gauche de la gauche parlementaire – a été une composante importante de la cause immigrée au cours des années 1968. Amorcer la réflexion sur les fondements et les spécificités de cet engagement durant la période, c’est évoquer le parcours de quelques militants et militantes qui l’ont incarné.
Résumé : Cet article porte sur l’institutionnalisation partielle de l’espace écologiste et l’émergence récente d’un tissu associatif actif sur le terrain de la prescription de normes comportementales dites « éco-citoyennes ». Il s’appuie sur une enquête menée par entretiens, observations et questionnaires, dans l’agglomération de Lyon. Il prend pour exemple les systèmes d’AMAP et apparentés, et interroge les appropriations dont ils font l’objet par de nouvelles associations « éco-citoyennes ». Ces dernières participent à déconflictualiser ces systèmes alimentaires locaux en les dissociant des luttes écologistes revendicatives à leur origine. En partie professionnalisées, dépendantes des pouvoirs publics, ces associations récentes sont largement investies par de jeunes écologistes. L’article analyse les modalités d’entrée en engagement de ces jeunes militant·es, et leur manière de redéfinir la conflictualité des discours écologistes au regard de leur parcours de socialisation ainsi que l’évolution des contextes institutionnel et universitaire dans lesquels se forgent et se stabilisent leurs engagements.