Résumé : Danièle Linhart, Modernisation : la cacophonie managériale
L’individualisation imposée par les directions d’entreprise est censée répondre aux
aspirations des salariés. Elle déstabilise pourtant leurs collectifs informels qui jouent
un rôle décisif dans la socialisation et la
capacité d’action collective. La modernisation managériale impose désormais une
mise en concurrence des uns avec les autres
et de chacun avec lui-même. Chacun est
conduit à négocier tout seul son destin
personnel dans l’entreprise et doit trouver à
s’épanouir dans une organisation du travail
qui reste pourtant inspirée par les principes
fondamentaux du taylorisme dans un
contexte d’informatisation systématique.
Pour réussir, il faut alors apprendre à
mobiliser les « bonnes émotions » en « bon
subordonné », quitte à se cliver et entrer
dans un processus de souffrance lié à de
possibles conflits de valeurs.
Résumé : Si l’objectif recherché par les jeunes militants en faveur de la défense de l’environnement est de libérer la nature de l’empire de l’économie capitaliste, ces derniers semblent animés quotidiennement par des logiques issues de ce même système qu’ils dénoncent. En nous appuyant sur une enquête qualitative et quantitative menée auprès de jeunes engagés dans le domaine de l’environnement, nous verrons que l’ennemi combattu s’est immiscé dans le rapport qu’ils entretiennent au temps et à leur corps. Dans la continuité des enquêtes ethnographiques disponibles, nous interrogerons alors la souffrance des jeunes militants écologistes, dont l’intimité capitaliste révèle des contradictions difficiles, voire impossible à surmonter.
Résumé : Les parents d’aujourd’hui cherchent parfois désespérément à éviter la souffrance à leur enfant. Mais le bébé peut-il et doit-il échapper à sa condition humaine et ne pas souffrir ? Et les parents eux-mêmes peuvent-ils, doivent-ils masquer leurs émotions négatives pour éviter leur impact sur l’enfant ? L’auteure partage ses réflexions de clinicienne sur ce sujet.
Résumé : La préoccupation clinique a quasiment déserté les établissements médico-sociaux pour adultes. Le déni de la souffrance psychique de nombreux usagers, pourtant porteurs de troubles psychopathologiques sévères pour certains, semble en être une des causes principales, en réduisant le handicap aux seules limitations sociales qu’il suffirait de compenser. La clinique comme souci d’une souffrance à accueillir, à comprendre et à soigner n’a donc plus sa place. La disqualification de cette orientation touche également les professionnels dont la compétence clinique n’est plus reconnue, soutenue et dirigée. La psychiatrie, comme recours possible pour étayer le soin dans le médico-social, est largement défaillante.
Résumé : Nos fonctions de psychiatre responsable de la liaison psychiatrique en gériatrie nous conduisent à devoir évaluer la capacité de discernement de patients âgés demandant l’assistance au suicide. Les enseignements de cette activité sont de plusieurs ordres. Tout d’abord, il est utile de posséder un canevas de questions permettant de guider la pensée. Il sera tout aussi nécessaire de s’enquérir des événements de vie du patient afin de mieux distinguer ce qui relève d’un désordre psychique corrigeable de ce qui s’inscrit dans l’histoire du sujet. Apparaitront ainsi plus clairement : les mouvements ambivalents du sujet à l’égard de la mort, l’épineuse question de la dépendance et son rapport étroit à l’enfance du sujet, la thématique du respect de la dignité, plutôt avancée par les proches et les équipes en écho au socius que par les patients, l’étonnante question financière, et enfin ce climat d’urgence à « trouver une solution » qui succède à la paralysie des soins entrepris. Un dispositif d’évaluation devrait, à notre sens, être constitué d’un binôme de médecins et bénéficier d’un espace de supervision permettant de partager la charge émotionnelle inhérente à cette fonction.